dimanche 3 septembre 2006

La fin d’une époque

On parle souvent de ces paliers que vous devez franchir pour passer à la suite. Le plus affolant, et certainement le plus sournois de tous, est celui qui vous propulse dans l’âge adulte. Pendant longtemps je pensais que je le verrais, telle une porte, j’entrerai dans le monde des adultes : un boulot, un appart, un chéri, un rêve d’enfant, une feuille d’impôt, des projets pleins la tête, et des sous plein le portefeuille…

Mais ça ne se passe pas comme ça, loin de là. Pour ma part la transition fut (est) longue. Je me dois de parler au présent parce que je n’ai pas fini le voyage. À mon sens, j’ai accompli le plus gros, il me manque à m’en rendre compte, à l’accepter et à « transformer l’essai » comme dirait l’autre. La transition a commencé de façon brutale et relativement imprévisible. Elle a foncé droit sur moi dans une 306 sport sous un tunnel, et m’a laissé avec la moitié du visage sur le tableau de bord, inconscient, au seuil de ma mort.

Le travail a commencé de suite, sans que je ne m’en aperçoive, je me suis transformé, j’ai glissé petit à petit vers le monde adulte. J’ai décidé de ne pas mourir sans avoir accompli des choses, et quand je parle de choses, je parle de choses dont je serai fier au seuil de ma mort.

Plus que deux seuils donc : la vie adulte, puis la mort. Vu comme ça on comprend pourquoi je n’ai pas voulu en finir tout de suite avec l’adolescence… Pourtant aujourd’hui je me rends compte de toutes ces vies adultes qui m’attendent. Ça me donne envie d’y plonger…

Donc petit à petit je suis devenu plus grand dans ma tête. Mais bien des choses me retenaient (retiennent) dans la douce moiteur de l’adolescence, que dis-je, de l’enfance même quelque part… Et puis, de façon progressive mais irréversible, tous ces murs se sont fissurés, et j’ai pu passer outre, tous ces liens se sont cassés, et j’ai pu avancer.

Il en reste encore, et pas des moindres.

Depuis un an, j’ai quitté ma ville, pour me perdre dans la froideur parisienne. Des liens se sont défaits, d’autres se sont resserrés, mais une chose est sûre : je ne suis plus le même. Mes amis font leurs vies, je fais la mienne. Et aujourd’hui on ne peut plus revenir en arrière. Tout le monde quitte Toulouse, tout le monde trouve sa voie. De ce qui faisait notre amitié : proximité, alcoolisme, études, projets, problèmes, que reste-il aujourd’hui ? Rien ou presque… Pourtant l’amitié est encore là. Mais pour combien de temps ?

Tous ces films où l’on voit des amis de 20 ans rigoler comme au premier jour, serait-ce possible pour moi aussi ? Nina, Mister Big, Emma, Lucie, Océane, et tous les autres, serez-vous encore là quand j’aurais 40 ans ? Serais-je encore là pour vos 40 ans ? Je n’ai pas la réponse, et vous non plus…

J’ai dû me détacher de vous physiquement pour avancer vers la vie adulte, mais je vous garde toujours dans mon cœur comme si je vous avais quitté hier. Je sais que c’est pareil pour vous. Tout ce chemin accompli en une année, tout ce travail sur nous-même. Tout ça peut nous rendre fier et confiant en l’avenir. Mais que va-t-il advenir de notre petit groupe ?

Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de perdre mes amis, mes chers amis, pour terminer ma transition vers l’âge adulte. Bien au contraire, ce chemin, on le fait ensemble, chacun à notre rythme, et c’est, j’espère, ce qui cimentera notre amitié pour la vie.

Je le dis souvent en rigolant : on finira dans la même maison de retraite ! Mais au fond, j’en rêve…

Alors oui c’est sûrement la fin de ma vie d’adolescent, et le début de quelque chose de bien, de nouveau, d’effrayant, mais c’est certainement pas la fin de notre amitié.

Qu’on se le dise, on ne se débarrasse pas de moi comme ça ! Alors allez-y, traversez des océans, enterrez-vous dans une province sans TGV, vivez sans le net, ne prenez pas l’avion pour venir me voir… Mais continuez à m’aimer à moitié de ce que je vous aime, et je serai heureux.


Gauthier qui ferait mieux de boire le samedi plutôt que de se mettre devant une page word vide ;)

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